Titre : Les clairs de lune de Théo
Auteure : Mariane Oestreicher-Jourdain
Editions : Oskar
Année de parution : 2015
Pages : 165 pages
Prix : 12,95 €
Résumé :
A la mort de sa grand-mère, Théo est placé en foyer avec pour héritage une boîte contenant les disques vinyles qui ont bercé son enfance, et une somme d’argent léguée en secret pour qu’il s’achète un piano, lui qui n’en a jamais joué. Partant à la recherche de ce piano, Théo commence alors un long chemin vers son passé troué de secrets et de mensonges. De rencontre en rencontre, de sonate en prélude, d’une branche à l’autre d’un arbre généalogique blessé, Théo va découvrir ce que les adultes, lâches ou trop inquiets, ne lui ont jamais révélé. Car la musique, elle, ne craint pas de dire les choses.
Mon opinion personnelle :
Je commence par remercier Angélique et les éditions Oskar pour ce charmant envoi !
Pour un peu, je ne m’arrêtais pas sur cet ouvrage. Ce sont les mots clés ajoutés sur le programme presse des éditions Oskar qui m’ont incitée à y regarder de plus près. Finalement, je l’ai lu, et j’ai vraiment bien fait.
Les personnages sont plutôt atypiques. Le narrateur, Théo, est très étonnant. Bien que jeune, il fait preuve d’une maturité et d’un aplomb déconcertants. Bien sûr, la naïveté pure de l’enfance rôde encore en lui. Mais il a également cette espèce de force insufflée par les coups durs de la vie, qui contrastent avec ce corps d’enfant. C’est un jeune garçon criant de vérité, qui parvient facilement à nous toucher. Son éducateur, le « Viking », comme Théo l’appelle, est un grand gaillard émouvant, qui tente d’encaisser, avec un cœur débordant d’affection pour le petit garçon, J’ai énormément apprécié ce personnage, dont la douceur et la chaleur nous surprenaient agréablement. Mention spéciale également pour la jeune vendeuse de la boutique de pianos, très naturelle, généreuse, et surtout attachante. Dans l’ensemble, j’ai vraiment apprécié ces personnages très bien travaillés, qui dégageaient quelque chose de profond et de remuant, et qui, au fil des pages, se révélaient toujours plus accueillants et séduisants.
Le style de l’auteure est franchement plaisant. J’avoue qu’au début, j’ai eu un tout petit peu de mal à rentrer dans l’histoire. Il m’a fallu quelques dizaines de pages pour pleinement me faire à l’ambiance assez singulière du roman. Mais, une fois la chose faite, impossible de le lâcher. Le rythme s’accélère au fur et à mesure de la lecture, de façon à la faire monter crescendo. Bien qu’il ne s’agisse pas forcément d’un roman très drôle, on rit quand même, ému, amusé ou attendri par le comportement de Théo, innocent certaines fois, comique d’autres. Toutefois, globalement, il s’agit d’un bouquin relativement dur, plein de réalisme et d’émotions.
J’ai été très étonnée, voire même épatée, par l’intrigue. Tout commence par un drame. Un seul ? Peut-être plus. Au début, tout va très vite. On a à peine le temps de comprendre, de s’attacher, que déjà, tout est renversé. J’imagine que cette brutalité était voulue et nécessaire pour crédibiliser le plus possible le roman. La véritable histoire prend donc place. Toutefois, elle arrive de façon assez progressive, avec douceur, comme si l’auteure souhaitait ménager encore un peu son lecteur, sachant pertinemment bien ce qu’il va devoir affronter avec cette lecture. La musique fait alors sa grande apparition dans le livre. Il faut dire que cet art est véritablement le leitmotiv de l’ouvrage, ce qui l’anime et l’embellit. Il nous permet de nous laisser porter, tout en faisant mille et une découvertes fascinantes. Et c’est là que la citation de la couverture, « La musique parle encore quand les autres se sont tus« , prend tout son sens. C’est exactement l’idée de ce roman. Car l’autre grand sujet de ce livre, c’est la Seconde Guerre Mondiale, la déportation. C’est grâce aux artistes que certaines choses restent gravées à jamais, et ce livre est porteur de ce message. Sous les apparences d’une famille décomposée, c’est plutôt une population brisée que l’on découvre. Ce que j’ai particulièrement apprécié dans cette lecture, c’est le fait d’approcher ce tragique passé du point de vue d’un enfant. La violence de l’Histoire se heurte à l’innocence de l’enfance, et c’est magnifique. N’y-a-t-il pas de point de vue plus objectif et franc que celui d’un petit garçon solitaire ? Toutefois, l’auteure ne s’arrête pas là. D’une façon magistrale, elle met en avant d’autres thèmes toujours plus frappants et déchirants, qui méritent plus d’attention dans la littérature jeunesse. Je les tairai, afin de vous préserver un certain suspense. Mais sachez au moins qu’ils sont logiquement choisis, et qu’ils font tous échos aux deux sujets principaux du texte. Ce bouquin ne joue cependant pas sur la surprise. Il faut être honnête : On se doute de plusieurs éléments. Mais ce qui est intéressant à voir, c’est la façon dont ces points sont abordés, intégrés au récit. Tout est bien calculé, de manière à bouleverser le lecteur sans trop le blesser. Une seule chose m’a quelque peu dérangée au fil de cette lecture. Parfois, une once de fantastique faisait son apparition dans l’histoire. Je n’ai pas trouvé cela forcément très pertinent, cette idée donnant au texte un côté un peu « grossier » qui ne lui sied pas bien. Le charme était alors rompu pour un temps, en tous cas pour moi. La magie de la musique aurait suffi. Fort heureusement, ce malus est dérisoire face à la richesse du reste de l’intrigue, qui m’a littéralement envoutée.
La chute du récit a été formidable. Sincèrement, on ne peut rêver mieux. Présentée sous forme d’épilogue, la fin est exactement comme il le fallait pour conclure ce difficile roman. Plein d’espoir, avec une légère morale, elle achève le long puzzle qui compose cette lecture. Juste et mature, elle vous colle des frisson. Les personnages sont resplendissants, au paroxysme de leurs qualités. Chaque détail est parfaitement à sa place, et donne à croire en la vie, en la musique. Si l’on peut deviner certaines choses, on ne peut bien sûr pas tout comprendre à l’avance, et les quelques surprises qui font leur apparition sont vraiment bien trouvées. Je n’ai rien à redire, franchement, j’ai été séduite. Je ne peux que vous recommander très vivement ce roman, qui vous laisse sur une douce note de musique et d’espoir.
Le titre est bien trouvé. Les sens sont multiples, et tous collent bien au récit. La couverture est elle aussi forte de symboles. Je vous ai déjà parlé de la citation, que j’adore. Mais si vous regardez bien, vous verrez qu’elle est loin d’être le seul détail très représentatif de l’histoire… Bon, j’avoue ne pas être spécialement fan des couleurs et du trait de crayon, mais je dois tout de même saluer leur aspect très symbolique.
Au final, il s’agit d’une très belle lecture, qui m’a agréablement surprise. J’aurais eu tort de passer à côté ! Et il en serait de même pour vous… N’hésitez pas à vous y intéresser, il en vaut le détour. Porteur d’un fort message, ce roman fait l’éloge de la musique tout en œuvrant pour la mémoire de l’Histoire. A lire !
J’ai adoré ! |
Livre se trouvant dans ma propre bibliothèque.
Livre reçu grâce aux éditions Oskar. Merci à eux !
Je ne connaissais pas ! Ca a l'air très intéressant 🙂
Il l'est, sincèrement 🙂